Publié : 28 juillet 2025 à 10h15 par Romain Rouquette

Ça vaut le détour : Les souvenirs de la Reine Margot

Tous les jours de l'été, l'historien et écrivain aveyronnais, Daniel Crozes vous emmène en balade à la découverte des petites et grandes histoires qui font la richesse de nos régions. Aujourd'hui, il part à la recherche des traces laissées par la reine Margot lors de son passage dans nos régions.

Château de Bournazel

Nous vous entraînons, aujourd’hui, dans une grande escapade du Tarn-et-Garonne au Puy-de-Dôme par l’Aveyron et le Cantal à la poursuite de Marguerite de Valois que vous connaissez tous. C’est la Reine Margot qu’Isabelle Adjani incarna au cinéma en 1994 pour Patrice Chéreau.

 

Pourquoi entreprit-elle, en 1585, une chevauchée aussi rocambolesque de l’Agenais à l’Auvergne ?

 

Cette chevauchée a une histoire. En 1582, Marguerite de Valois retourne à Paris après trois années et demi passées en Gascogne, s’opposant aux nouveaux amants de son frère Henri III qui excitent le souverain contre elle. Sommée de quitter la cour, elle se réfugie dans son domaine de l’Agenais où elle s’ingénie à se constituer un royaume en 1585, se battant même contre les troupes de son mari. Les bourgeois d’Agen se révoltent et la chassent. Elle s’enfuit le 25 septembre 1585 pour la forteresse de Carlat, dans le Cantal, dont le gouverneur Gilbert de Lignerac est le frère de Robert de Lignerac qui a procuré à Margot des soldats pour ses combats en Agenais et qui est également son amant. Pendant six journées, elle chevauche derrière Robert de Lignerac, sur le même cheval et sans coussin, au point qu’elle aura la cuisse toute écorchée en arrivant à Carlat.

 

Où s’arrêta-t-elle ?

 

Au château de Brassac, dans le Tarn-et-Garonne, dans la soirée du 25 septembre 1585. On la retrouve au château de Bournazel, en Aveyron, le 27 septembre puis au château d’Entraygues mais c’est contesté par certains historiens. Une certitude : elle marqua l’étape dans la bourgade de Montsavy, dans le Cantal, où sa demeure de couchage est toujours un mystère.

 

Son arrivée à Carlat est attestée pour le 30 septembre. Elle est épuisée mais saine et sauve. Elle y séjourne pendant une année avant de rejoindre le 14 octobre 1586 le château d’Ibois, près d’Issoire, proposé par sa propre mère qui est Catherine de Médicis. Elle passe par le col du Lioran, Murat et Besse en Chandesse où on rappelle encore son souvenir. A Ibois, elle est capturée par le marquis de Canillac qui la conduit jusqu’à la forteresse d’Usson, dans le Puy-de-Dôme. Elle y vécut 19 ans mais s’en échappa le 4 juin 1857 pour assister à une fête à Vic-sur-Cère où son souvenir est conservé. En juillet 1605, Henri IV dont elle a divorcé l’autorisera enfin à s’installer au château de Madrid, au Bois de Boulogne. Ses errances s’achèvent enfin. 

 

En 1585, Marguerite de Valois s’était arrêtée dans le Rouergue. En a-t-elle été la dernière comtesse comme on l’affirme ?

 

Oui ! Elle hérita le 2 août 1578 du titre et des droits de comtesse d’Agenais, du Rouergue et du Quercy ainsi que des quatre jugeries en échange des 300 000 écus de sa dot que son frère, le roi Henri III, était dans l’incapacité de verser pour son mariage. Le 18 août 1572, à Paris, Marguerite avait épousé Henri de Béarn qui était le fils de Jeanne d’Albret – comtesse de Rodez –, qui était un prince protestant mais qui devenait, surtout et de fait, prétendant au trône de France en raison de la faible santé des trois frères de sa femme. Six jours plus tard, c’était la Saint-Barthélémy et les massacres des protestants par les catholiques. Comtesse du Rouergue, Marguerite percevait bien évidemment des revenus et elle disposait du pouvoir de nomination du sénéchal de la province comme en Quercy. Elle mourut à Paris le 27 mars 1615, à 62 ans, ne se souvenant plus certainement qu’elle avait été autrefois la comtesse du Rouergue et son souvenir y est beaucoup moins vivace qu’en Auvergne où on se la disputerait presque.

 

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