Publié : 1er juillet 2025 à 10h15 par Romain Rouquette

Ça vaut le détour : Joséphine Baker et la Dordogne

Tous les jours de l'été, l'historien et écrivain aveyronnais, Daniel Crozes vous emmène en balade à la découverte des petites et grandes histoires qui font la richesse de nos régions. Aujourd'hui, il vous amène à la découverte de la Dordogne sur les traces du passage de Joséphine Baker.

Château des Milandes

C’était une grande vedette de la chanson et on continue toujours à fredonner aujourd’hui J’ai deux amours dont Géo Koger écrivit les paroles et Vincent Scotto, la musique, en 1930. Joséphine Baker a marqué son temps et la Dordogne où elle s’installa au château des Milandes en 1937. Elle l’acheta en 1947 et le garda jusqu’en 1969.

 

 D’où débarqua Joséphine en 1925 lorsqu’elle arriva en France ?

 

De cette Amérique noire qui a apporté le jazz en Europe. Freda-Joséphine Mac Donald est née le 3 juin 1906 à Saint-Louis dans le Missouri. Elle a participé très jeune à des spectacles ambulants et donc partagé l’existence souvent décousue des saltinbanques. Elle a affronté la violence raciste, entre autres pendant les émeutes de 1917, et débarque en France grâce à Caroline Dudley alors qu’elle n’a que 19 ans. On la présente comme la reine du charleston, elle est habitée par le jazz et elle révolutionne le monde du music-hall au Théâtre des Champs-Elysées à Paris dans La Revue Nègre, se contentant comme costume d’une ceinture de bananes en peluche, montrant son corps sculptural dans des danses très lascives et se produisant les seins nus. Elle imposera ensuite sa voix légère aux Folies Bergères puis au Casino de Paris. 

 

Et elle commence une belle carrière...

 

Quelle carrière étonnante ! Dès 1926, elle ouvre son propre club qu’elle appelle Chez Joséphine. On la retrouve à la Salle Pleyel en 1928. Elle obtient le Grand prix du Disque en 1931 et épouse Jean Lion en 1937 dont elle n’aura pas d’enfants. Comme elle l’a chanté avec passion, elle a deux pays et elle a adopté la France.

 

En 1939, elle apporte son soutien aux soldats affectés à la ligne Maginot puis elle s’engage dans la Résistance tout en effectuant ses tournées en France, en Suisse, en Italie, en Belgique, au Portugal, au Maroc et même à Berlin qui est placée sous la botte nazie. A cette occasion, elle recueille des renseignements qu’elle transmet à la Résistance grâce à des partitions de musique contenant des indications qu’elle a transcrites à l’encre sympathique. Victime d’une paratyphoïde qui l’immoblise pendant plusieurs mois sur un lit d’hôpital, Joséphine a la surprise d’y recevoir les insignes de sous-lieutenant des troupes féminines auxiliaires de l’armée française.    

 

Femme au grand cœur, militante féministe, résistante, elle avait adopté plusieurs enfants.

 

Elle adopte les quatre premiers en 1954, les installe au château des Milandes en Dordogne, cette demeure du XVe siècle restaurée au XIXe siècle qui se dresse dans la région de Beynac-Castelnaud. Elle a tout essayé pour récolter des fonds et le conserver, revenant à l’Olympia en 1964 alors qu’elle avait abandonné le music-hall en 1956, deux années après le grand prix de l’académie Charles-Cros, mais elle est menacée d’expulsion en 1968 puis expulsée en 1969. On la retrouve au Sporting de Monte Carlo en 1974 et à Bobino en  avril 1975 pour ses derniers adieux à la scène. Si elle est entrée au Panthéon en 2021, devenant alors la première femme noire à y être admise, son souvenir demeure plus que jamais vivant en Dordogne au château des Milandes que sa famille arc-en-ciel de 12 enfants a peuplé et, surtout, animé joyeusement pendant une période qu’elle considéra bien trop brève. Chapeau, Joséphine !

 

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