Publié : 30 juin 2025 à 14h15 par Romain Rouquette

Ça vaut le détour : Estaing et la tradition de la Saint-Fleuret

Tous les jours de l'été, l'historien et écrivain aveyronnais, Daniel Crozes vous emmène en balade à la découverte des petites et grandes histoires qui font la richesse de nos régions. Aujourd'hui, il vous amène à Estaing, au coeur de la Saint-Fleuret.

Estaing

Les vacances d’été commencent et, avec elles, commence aussi une nouvelle saison de « Ça vaut le détour ». Nous vous proposons de découvrir des lieux connus de notre région ou plus confidentiels mais qui valent le détour par leur originalité ou leur histoire insolite, des hommes et des femmes ayant marqué leur époque, de produits qui contribuent à modeler l’identité d’un territoire. Aujourd’hui, nous partons pour Estaing, en Aveyron, qui accueillera des centaines de personnes ce dimanche 6 juillet à l’occasion de la Saint-Fleuret.

 

Qui était saint Fleuret ?

 

Fleuret est le saint patron du village d’Estaing qui détient nombre de ses reliques puisqu’il y mourut d’où son privilège au Moyen Age, où le culte des saints et la vénération de reliques étaient à la mode. Evêque d’Auvergne, il a vécu entre les Ve et VIe siècles comme l’ont prouvé la datation des ossements conservés. Dans la tradition et le merveilleux du Moyen Age, s’inscrit la relation du miracle d’Estaing sur la guérison d’un infirme qui aurait mangé du pain béni ou plutôt consacré par saint Fleuret. Estaing possède une fontaine que saint Fleuret aurait offerte aux habitants, proposant d’après une formule demeurée célèbre en ce pays de vignes : « Du vin pour un jour ou de l’eau pour toujours ». Son culte était très vivace au Moyen Age ; il disparut sous la Révolution pour renaître au XIXe siècle avant de se perpétuer jusqu’à nos jours

 

Il n’y a pas de Saint-Fleuret à Estaing sans procession costumée ni bénédiction du pain et du sel. Pourquoi ?

 

C’est un héritage du Moyen Age. La procession mi-religieuse et mi-profane succède à la grand-messe. On promène dans les rues le buste-reliquaire de saint Fleuret et on reconstitue le défilé tel qu’il pouvait être autrefois avec 150 personnages costumés : les saints, les saintes, les membres du clergé, les confréries, les pénitents, les représentants les plus célèbres de la grande famille d’Estaing dont le château domine la bourgade. Saint Michel brandit la balance du Jugement dernier pour admettre Fleuret au paradis. Ce jour-là, on procède à la bénédiction du pain et du sel qui était réputé autrefois pour protéger les troupeaux bovins des maladies comme l’eau de la fontaine de Saint-Fleuret grâce à laquelle nombre d’éleveurs de la Châtaigneraie cantalienne et du nord-ouest de l’Aveyron sauvèrent souvent leurs bœufs de labour.

 

A cette procession de la Saint-Fleuret, Valéry Giscard d’Estaing a souvent participé. Etait-il un descendant de la famille d’Estaing ?

 

Grâce à une décision du conseil d’Etat du 17 juin 1922, la famille Giscard peut adjoindre le nom d’Estaing à son patronyme. Selon les spécialistes, Valéry et son frère Olivier étaient parents au 15e degré civil en ligne féminine des derniers porteurs du nom. Jean III d’Estaing apparaît dans leur généalogie ; il avait épousé en 1584 Gilberte de La Rochefoucault dont il avait eu neuf enfants, fondant la branche de Haute Auvergne, la seule qui demeura au lendemain de l’extinction de la branche rouergate en 1794. Lucie-Madeleine d’Estaing eut une petite-fille qui convola avec Agénor Bardoux qui a été député (1871-1881) et sénateur (1882-1897) du Puy-de-Dôme, ainsi que ministre (1877-1879). Jacques Bardoux, leur fils, épousa Clémence Villa dont le père dirigeait la banque qu’il avait fondée à Millau. Leur fille, Mary Bardoux, épousa Edmond Giscard qui était né à Clermont-Ferrand en 1894 et qui était le père de Valéry. 

 

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