Publié : 11 août 2025 à 10h15 par Romain Rouquette

Ça vaut le détour : Dans les gorges de l’Allier

Tous les jours de l'été, l'historien et écrivain aveyronnais, Daniel Crozes vous emmène en balade à la découverte des petites et grandes histoires qui font la richesse de nos régions. Aujourd'hui, il vous amène au coeur des gorges de l'Allier.

Gorges du Tarn en Haute Loire

Les gorges de l’Allier entre Langogne, en Lozère, et Langeac, en Haute-Loire, sont magnifiques avec leurs méandres encaissés qui sont difficilement accessibles mais conviennent à la réalisation d’un barrage. Nous vous emmenons aujourd’hui à Monistrol-d’Allier à ne pas confrondre avec Monistrol-sur-Loire même si les deux localités se trouvent en Haute-Loire.

 

Quand y construisit-on un barrage ?  

 

Les travaux se déroulèrent de 1939 à 1941 dans ces gorges de l’Allier qui étaient convoitées depuis les années 1900-1910 par des compagnies électriques. Le 9 juillet 1918, la Compagnie de la Loire et du Centre obtenait l’autorisation de construire un barrage de sept mètres de haut mais elle n’entama pas alors le chantier, déposant une nouvelle demande de concession pour les chutes de l’Allier et de son affluent, l’Ance du Sud. Mais le ministère rejetta la demande en 1932, mettant en avant des contraintes piscicoles pour l’Allier, et délivra une autorisation pour l’Ance du Sud en 1934. Finalement, la déclaration d’utilité publique devait intervenir en 1938 tandis que la Compagnie renouvela sa demande pour l’Allier en 1939, entamant les travaux sans plus attendre et personne ne les contesta vraiment puisque la France était en guerre.

 

Ce barrage a-t-il été bien accepté ?

 

Les pêcheurs l’ont contesté à l’époque, ils persistent aujourd’hui. Déjà le barrage-poids de Saint-Etienne-du-Vigan (Lozère) qui a une hauteur de 12 mètres et qui était en service depuis 1898, constituait un obstacle infranchissable pour les saumons qui avaient l’habitude de remonter la rivière et de se reproduire en haute vallée.

 

Avec une muraille de 17 mètres de hauteur, le barrage de Poutès-Monistrol compliqua plus encore cette situation. Or l’Allier est l’une des rares rivières à saumon de France. En 1938, avant le chantier, les Eaux et Forêts avaient dénombré 157 zones de frayères entre Brioude et Chapeauroux dont 112 en amont de Poutès. Avec les travaux, des dizaines disparurent. Certes un ascenseur à poisson a été installé en 1986 et on a remarqué que cent dix saumons l’ont emprunté la meilleure année. Mais le fonctionnement même du barrage chargé de produire au moment des pointes de consommation entraîne des variations importantes de débit qui détruisent des frayères en aval.

 

Les gorges de l’Allier sont historiquement le territoire du saumon mais également de l’art religieux.

 

De Monistrol-d’Allier à Langeac, les monuments abondent. Près de Monistrol qui est depuis le Moyen Age une étape sur le chemin de Saint-Jacques et à quelques dizaines de mètres de la rivière, on admirera la chapelle de Sainte-Marie-des-Chazes, son architecture intérieure soignée, l’élégante colonnade de l’abside qui contrastent avec l’austérité des murailles extérieures. Elle dépendait, autrefois, de l’abbaye bénédictine de Saint-Pierre-des-Chazes construite en 800 sur l’autre berge de l’Allier – Chaze signifiant maison. D’autres villages ou édifices méritent l’attention comme Saint-Arcons-d’Allier et son église à la nef romane très pure aux colonnes basaltiques, Chanteuges et son ancienne abbaye qui était la résidence d’été de l’abbé de La Chaise-Dieu, ou Pébrac sur la Desges – un affluent de l’Allier – et les beaux chapiteaux romans sculptés de son église. Ce patrimoine souvent méconnu comblera les amateurs d’art.

 

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