Publié : 24 avril 2025 à 12h18 par Stéphane Jacquemin
Uzerche : une boulangerie au centre de détention
C’est une première en Nouvelle Aquitaine. Depuis cet été, le centre de détention d’Uzerche accueille en son sein, une boulangerie. Six détenus sont inscrits dans un parcours de formation réalisé en partenariat avec l’Éducation Nationale.
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Face à la récidive, les questions de la réinsertion et de la formation sont au cœur de la politique carcérale. À Uzerche, depuis le début de l’année scolaire, une boulangerie s’est installée dans le centre de détention, une première, dans un établissement pénitentiaire, en Nouvelle-Aquitaine.
En partenariat avec l’Éducation Nationale, 6 détenus profitent d’une formation dispensée par un boulanger d’Uzerche, Laurent Saute.
« Une vraie chance (…) on est privilégié »
Les 6 détenus viennent de passer leur CAP ; Wassim, 26 ans, fait partie des heureux apprenants :
« Moi, j'ai pris une peine de 7 ans, ça fait 2 ans que je suis actuellement en détention. Grâce à cette formation, on a appris un métier et on espère voir la porte de sortie un peu plus rapidement que prévu ».
« Franchement ça a été une vraie chance. On est plus de 600 détenus, je vous raconte pas tous les gens qui veulent venir travailler en boulangerie, faire cette formation là, on est privilégié ».
« Trouver une porte de sortie, ça a toujours été dans nos têtes. Par contre sortir boulanger, ça on était loin d'imaginer ça ».
« Quand je suis venu à Uzerche, je n’étais pas trop content, c’est loin de chez moi, je comprenais pas pourquoi on m'avait envoyé ici ! Au final quand je suis arrivé et qu’on m’a proposé cette formation, de suite la pression, elle est descendue. Je me suis dit que je vais faire quelque chose de bien. J’me suis dit, même si je suis loin de la famille, c'est pas grave, on va apprendre quelque chose durant cette détention et elle ne va pas me servir à rien ».
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600 baguettes pour...600 détenus
Chaque jour, 600 baguettes sont préparés dans le fournil du centre de détention d’Uzerche : « tous les détenus, ils mangent une baguette par jour » explique Wassim « ils peuvent se faire des bons sandwichs, ils peuvent bien manger, c’est important »
Auparavant « les baguettes étaient fabriquées par un industriel qui les amenait de Poitiers » précise Laurent Saute, « un aspect environnemental, non négligeable, point de vue carbone, on est quand même dans la logique » ajoute le boulanger uzerchois qui forme les 6 détenus.
Quid de ses apprenants quelque peu singuliers ? « Sur les 6, on a vraiment une bonne session » répond Laurent Saute « ils sont très engagés, très demandeurs de savoir ».
Le boulanger n’a d’ailleurs aucun à priori à leur apprendre le métier :
« Une des bases de notre métier, c'est la transmission du savoir. Donc quand on nous propose de pouvoir former des boulangers, on saisit la chance. Surtout que notre profession a énormément besoin d’une main d'œuvre qu'on ne trouve pas forcément. Donc là, on a la chance de pouvoir former des gens qui, même si c'est pas chez nous il y en a un de Bayonne, et bien ça fera un boulanger de plus à Bayonne ! Le but, c'est que la profession retrouve des bras ».
« Un pont supplémentaire construit entre le dedans et le dehors »
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Pour Loïc Ben Ghaffar, chef d’établissement du centre de détention d’Uzerche, cette boulangerie et au-delà cette formation est « un pont supplémentaire construit entre le dedans et le dehors ». Elle apparait également répondre à un des objectifs de la chancellerie : atteindre en 2027 un taux de 50 % de détenus rémunérées et en fonction.
« Cet objectif de 50%, c'est un objectif fort parce qu'on reste convaincu que l'emploi et la formation sont des moyens d'insertion ou de réinsertion forts pour notamment éviter la récidive et le retour en prison ».
À Uzerche, aujourd’hui environ 80 des 600 détenus travaillent. Par ailleurs, le centre de détention peut se targuer d’avoir 300 détenus qui suivent un enseignement scolaire : « c’est le taux record sur la Nouvelle-Aquitaine, souligne Valérie Baglin-Le Goff, la rectrice de l’académie de Limoges, « des formations de tous ordres, universitaire, apprentissage de la langue ou de formations diplômantes, comme ici, le CAP ».
« L’école, elle est partout » précise Valérie Baglin-Le Goff, « elle a partout son rôle à jouer (…) l’école, c’est ici, c’est évidemment à l’école, c’est dans les hôpitaux (…), c’est important que l’école soit aux côtés de tous ceux qui en ont besoin ».