Publié : 11h29 par La rédaction

Dermatose nodulaire : pourquoi la stratégie française divise

Face à la dermatose nodulaire bovine, la France mise sur une stratégie stricte mêlant abattage, biosécurité et vaccination. Explications avec Pierre Cazenave, vétérinaire et référent national sur le sujet.

Manifestation des agriculteurs contre la DNC à Tulle (Corrèze) le 9-12-25.
Manifestation des agriculteurs contre la DNC à Tulle (Corrèze) le 9-12-25.
Crédit : Stéphane Jacquemin / Totem
Des manifestants agricoles à Tulle, avec un tracteur et des drapeaux syndicaux.

 

Pierre Cazenave, vétérinaire praticien, président du GTV Aveyron et référent dermatose nodulaire pour la Commission épidémiologie à la SNGTV (société nationale des groupements techniques vétérinaires), répond aux questions de Totem.

 

Quelle est la stratégie sanitaire mise en place en France ?

L’objectif est l’éradication de cette maladie classée A dès sa détection. Elle repose sur quatre piliers : détection précoce, éradication des sources de virus (dépeuplement et désinfection), biosécurité avec restriction des mouvements et vaccination pour créer un matelas immunitaire.

 

Pourquoi l’abattage pose problème mais reste incontournable aux yeux des autorités ?

À l’instant T, nous n’avons pas de moyen fiable pour connaître le statut d’un animal. L’abattage total permet d’éliminer rapidement toutes les sources de virus. Si on se limitait à un abattage partiel, le virus persisterait dans l’environnement et se diffuserait.

 

Pourquoi la vaccination ne suffit pas ?

Vacciner sans connaître le statut des animaux comporte des risques. Si l’animal est infecté ou en incubation, le vaccin ne fonctionne pas. De plus, vacciner tout le cheptel français ferait perdre le statut indemne et bloquerait les échanges commerciaux pendant 8 à 16 mois.

 

Quels sont les risques pour l’homme et pour les animaux ?

Premier point : ce n’est pas une zoonose, donc aucun danger pour l’homme. Pour les bovins, la mortalité est estimée entre 5 et 10 %. Le taux de morbidité (les animaux qui déclenchent la maladie) varie entre 20 et 50 %. Certains animaux guérissent, mais lentement, ce qui pénalise fortement la production de viande et de lait. Une partie du cheptel peut devenir une non-valeur économique.

 

Que répondez-vous aux contestations des éleveurs ?

C’est une maladie anxiogène et les mesures sont difficiles à vivre. Mais elles protègent le plus grand nombre. Les réseaux sociaux amplifient les contre-vérités, d’où l’importance de la pédagogie.

 

Quels sont les chiffres clés pour comprendre ?

Depuis le début de la crise, environ 3.400 bovins ont été dépeuplés, soit 0,03 % des 16 millions de bovins français. Laisser la maladie courir serait dramatique, avec une mortalité estimée entre 5 et 10 %.