Publié : 21 septembre 2025 à 18h00 par
Tiphaine Coulon

Le mystère Jubillar devant les assises du Tarn

Le procès de Cédric Jubillar s'ouvre ce lundi 22 septembre à Albi. Le verdict est attendu le 17 octobre.

Justice (illustration)
Justice (illustration)
Crédit : Tiphaine Coulon / TOTEM

La cour d'assises du Tarn va tenter à partir de ce lundi 22 septembre de percer le mystère du dossier Jubillar. Dans cette affaire judiciaire autant que médiatique, les jurés doivent répondre à une question centrale : Cédric a-t-il tué Delphine son épouse, disparue dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020, et dont le corps n'a jamais été retrouvé ? Le peintre-plaquiste, détenu depuis juin 2021 et qui vient de célébrer ses 38 ans en prison, nie être le meurtrier de celle qui était devenue sa compagne vingt ans plus tôt, une infirmière qui lui a donné deux enfants mais qui voulait le quitter.

En quatre ans et demi d'une procédure à rebondissements, les interrogations sur ce qui s'est passé au cours de cette nuit d'hiver à Cagnac-les-Mines, en plein couvre-feu lié au Covid, nourrissent un intérêt non-démenti.
Et c'est d'abord en cela que le procès qui s'ouvre revêt une dimension hors normes. "Contrairement à ce que le public non initié pourrait penser, la particularité de ce dossier ne réside pas dans la nature des faits reprochés à l'accusé, ni même à l'absence de corps ou d'aveux, mais bien dans son exceptionnelle médiatisation", souligne Nicolas Jacquet, procureur général auprès de la cour d'appel de Toulouse, la juridiction en charge
d'organiser le procès.

Une instruction à charge ou des éléments suffisants ?

Au cours de ce procès qui aura lieu à Albi, défileront 65 témoins et 11 experts pour essayer d'éclairer un dossier de 27 tomes et plus de 15.000 pages de procédure. Les avocats de Cédric Jubillar, Alexandre Martin et Emmanuelle Franck (son premier défenseur, Jean-Baptiste Alary, ayant renoncé pour raisons de santé cet été) n'ont eu de cesse de dénoncer une "instruction à charge". "Dès le début, les enquêteurs ont estimé que le principal suspect, c'était Cédric Jubillar. Des portes ont été entrouvertes, elles ont été rapidement refermées sans qu'il y ait de véritables investigations", dénonce Maitre Martin.

Mais pour les juges d'instruction, l'enquête a au contraire permis d'exclure d'autres hypothèses et de retenir des "charges suffisantes" pour étayer l'accusation de meurtre par conjoint, un crime passible de la réclusion à perpétuité. Les magistrates se sont appuyées sur le fait que, selon des témoignages, le mari ne supportait pas l'idée que sa femme le quitte et fréquente un autre homme. Elles estiment qu'une dispute a éclaté cette nuit-là, en s'appuyant sur un faisceau d'indices : un témoignage de leur fils âgé de six ans à l'époque, une paire de lunettes de Delphine retrouvée cassée ou encore des cris entendus par des voisines, éléments contestés par la défense.

La défense s'interroge : où sont les preuves ?

Pour les juges, Cédric Jubillar s'est aussi montré confus au fil des auditions et son comportement est venu renforcer leur impression d'ensemble : un mari qui ne participe pas ou peu aux recherches de son épouse disparue, un homme qualifié d'impulsif qui tient, avant la disparition, devant témoin des propos menaçants au sujet de son épouse si elle en venait à le quitter… Dernièrement, le témoignage d'une jeune femme ayant entretenu une relation avec l'accusé en prison et affirmant qu'il lui avait avoué le meurtre, est venu s'ajouter au tableau dressé par l'accusation, déjà nourri par d'autres propos troublants tenus par Cédric Jubillar en détention.

"Il y a dans ce dossier assez d'éléments pour que l'on considère, dans son intime conviction, que ce type est coupable", estime Philippe Pressecq, avocat d'une des cousines de Delphine, partie civile. "Et quand il sera condamné, je ne penserai pas une seule seconde que c'est une erreur judiciaire", ajoute-t-il. Côté défense, c'est justement ce spectre que l'on agite, jugeant que le dossier d'accusation demeure "bancal". "Nous allons demander à la justice et aux jurés de revenir à la base", explique ainsi Me Martin, il ne s'agit "pas d'essayer de construire une histoire autour d'un personnage qui a des défauts, qui peut parfois avoir parlé à tort et à travers, qui peut ne pas être aimé de tout le monde", dit-il. "La question que l'on pose, c'est : mais quelles sont les preuves ?".

Le verdict est attendu le 17 octobre.

(Avec AFP).